C++ en 1983…

J’ai posté il y a peu une note de lecture sur l’Annotated Reference Manual (l’ARM pour les intimes). Cela m’a incité à aller chercher plus loin. C’est ainsi que j’ai mis la main sur un document dont on devine à sa seule apparence qu’il est plutôt ancien. Je ne peux résister au plaisir, en passant, de vous livrer la photo de famille du premier meeting du groupe de travail sur C++.

Initial meeting Group C++

Bjarne Stroustrup n’a pas tellement changé, vous allez le reconnaitre facilement !

Voici le document en question.

On ne peut pas vraiment parler de norme, ce document décrit le langage C++ d’une manière que l’on dirait aujourd’hui sommaire. Certains éléments du langage sont absent de cette version préhistorique. Les plus remarquables sont l’absence des mots-clé pour les visibilités private et protected !

The Software Preservation Group

http://www.softwarepreservation.com/

Notre discipline n’est plus si jeune. Elle accuse 65 ans, enfin à peu près en fonction de ce que l’on s’accorde à considérer comme l’informatique moderne…

Mémoriser, référencer les documents ayant trait à cette histoire devient une tâche importante à laquelle le SPG s’attelle. Cela reste très partiel, souvent Wikipedia fait même mieux, mais le SPG référence aussi de vieux documents introuvables ailleurs !

The Software Preservation Group

Note de lecture : The Computer Boys Take Over, par Nathan Ensmenger

Note : 7 ; Une leçon d’histoire sous forme de traité universitaire de qualité estampillée MIT

Ceci est un livre d’histoire. Sur l’histoire de l’informatique, depuis le début des années 50 (voir la fin des années 40) jusqu’au début de 70. L’auteur s’intéresse à l’émergence du métier de programmeur. Ce n’est pas non plus un texte facile à lire, c’est du sérieux. Du très sérieux ; ce n’est pas pour rien que le livre est édité chez MIT press. Les 9 chapitres du volume comptent une centaine de références bibliographiques … chacun !

Je parlais d’un texte pas forcément facile à lire : l’auteur a fait le choix d’une trame thématique plutôt que d’une trame historique. Ainsi, chaque chapitre traite d’un sujet particulier dont il retrace l’historique (remontant à des dates différentes selon les sujets). Certains chapitres font références aux mêmes évènements ou situations, laissant au lecteur le soin de faire les corrélations. Si il s’agit d’histoire récente, il ne faut pas oublier que manquer de précision, éluder certains faits ou en romancer d’autres est assez facile, sinon commun. Rien de tel ici, l’auteur est d’une précision diabolique dans son énumération des faits, des citations et de sa trame évènementielle. La prose ne cherche pas à faire oublier qu’il s’agit là d’un travail de recherche. Si cela contribue à la difficulté de lecture, c’est la très grande force de l’ouvrage. Il est temps de s’intéresser à son contenu.

Le premier chapitre est une introduction au reste de l’ouvrage : l’avènement du métier de programmeur qui émerge du monde de l’électronique mais peine à se faire une place en tant que discipline à part entière. Il évoque la fameuse « crise du logiciel » dont l’origine remonte à la conférence de l’OTAN de 1968.

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L’histoire des écritures, par Clarisse Herrenschmidt

Les échos sur la keynote de cette chercheuse du CNRS à Devoxx 2013 étaient arrivés jusqu’à moi par de multiples canaux. Cette présentation est en ligne, nous pouvons en partager le bonheur. A 70 ans (je crois), Mme Herrenschmidt a l’énergie d’une horde de geeks ! Et elle nous convie pendant 40 minutes à un voyage dans le temps depuis les premiers systèmes de comptage, jusqu’à Alan Turing !

Le support de présentation est moins utile, mais si vous souhaitez revoir à loisir les artéfacts présentés par l’oratrice, il est là.

The inspiring heroism of Aaron Swartz

5secondsofmayhem:

The internet freedom activist committed suicide on Friday at age 26, but his life was driven by courage and passion

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The internet activist Aaron Swartz, seen here in January 2009, has died at the age of 26. Photograph: Michael Francis Mcelroy/AP

(updated below)

Aaron Swartz, the computer programmer and internet freedom activist, committed suicide on Friday in New York at the age of 26. As the incredibly moving remembrances from his friends such as Cory Doctorow and Larry Lessig attest, he was unquestionably brilliant but also – like most everyone – a complex human being plagued by demons and flaws. For many reasons, I don’t believe in whitewashing someone’s life or beatifying them upon death. But, to me, much of Swartz’s tragically short life was filled with acts that are genuinely and, in the most literal and noble sense, heroic. I think that’s really worth thinking about today.

At the age of 14, Swartz played a key role in developing the RSS software that is still widely used to enable people to manage what they read on the internet. As a teenager, he also played a vital role in the creation of Reddit, the wildly popular social networking news site. When Conde Nast purchased Reddit, Swartz received a substantial sum of money at a very young age. He became something of a legend in the internet and programming world before he was 18. His path to internet mogul status and the great riches it entails was clear, easy and virtually guaranteed: a path which so many other young internet entrepreneurs have found irresistible, monomaniacally devoting themselves to making more and more money long after they have more than they could ever hope to spend.

But rather obviously, Swartz had little interest in devoting his life to his own material enrichment, despite how easy it would have been for him. As Lessig wrote: “Aaron had literally done nothing in his life ‘to make money’ … Aaron was always and only working for (at least his conception of) the public good.”

Specifically, he committed himself to the causes in which he so passionately believed: internet freedom, civil liberties, making information and knowledge as available as possible. Here he is in his May, 2012 keynote address at the Freedom To Connect conference discussing the role he played in stopping SOPA, the movie-industry-demanded legislation that would have vested the government with dangerous censorship powers over the internet.

Critically, Swartz didn’t commit himself to these causes merely by talking about them or advocating for them. He repeatedly sacrificed his own interests, even his liberty, in order to defend these values and challenge and subvert the most powerful factions that were their enemies. That’s what makes him, in my view, so consummately heroic.

In 2008, Swartz targeted Pacer, the online service that provides access to court documents for a per-page fee. What offended Swartz and others was that people were forced to pay for access to public court documents that were created at public expense. Along with a friend, Swartz created a program to download millions of those documents and then, as Doctorow wrote, “spent a small fortune fetching a titanic amount of data and putting it into the public domain.” For that act of civil disobedience, he was investigated and harassed by the FBI, but never charged.

But in July 2011, Swartz was arrested for allegedly targeting JSTOR, the online publishing company that digitizes and distributes scholarly articles written by academics and then sells them, often at a high price, to subscribers. As Maria Bustillos detailed, none of the money goes to the actual writers (usually professors) who wrote the scholarly articles – they are usually not paid for writing them – but instead goes to the publishers.

This system offended Swartz (and many other free-data activists) for two reasons: it charged large fees for access to these articles but did not compensate the authors, and worse, it ensured that huge numbers of people are denied access to the scholarship produced by America’s colleges and universities. The indictment filed against Swartz alleged that he used his access as a Harvard fellow to the JSTOR system to download millions of articles with the intent to distribute them online for free; when he was detected and his access was cut off, the indictment claims he then trespassed into an MIT computer-wiring closet in order to physically download the data directly onto his laptop.

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Note de lecture : Steve Jobs, par Walter Isaacson

Note : 8 ; L’homme qui pliait le monde à sa propre vision !

Se sachant condamné, Steve Jobs a choisit lui-même son biographe. Il lui fallait le meilleur, et le fait que celui-ci refusa catégoriquement cette proposition n’était pas un élément qui rentrait en ligne de compte pour le créateur d’Apple. Car bien sûr, il finit par accepter. Comme le montre le livre au long de ses 41 chapitres, ce projet est symptomatique du mode de fonctionnement de ce personnage hors norme : ne pas laisser aux autres l’initiative de ce que l’on dirait de lui, s’assurer d’avoir le meilleur afin de sortir la meilleure biographie possible rendant impossible d’en sortir d’autres. Faire ce qu’il faut pour que l’auteur produise le meilleur : carte blanche, aucune censure (en fait Steve Jobs ne lira jamais le livre), libre accès aux documents et aux personnes. Et encore une fois, le résultat atteint des niveaux d’exigence très élevé.

Il s’agit d’une vraie biographie, elle démarre par la rencontre de ses parents naturels, pour se poursuivre par son adoption, son enfance et son adolescence et sa jeunesse tumultueuse qui le conduira à sa rencontre avec Steve Wozniak, aussi différent de Jobs que l’on puisse l’imaginer. La suite est mieux connue dans ses grandes lignes, car bien qu’entrecoupée d’un exode elle est intimement liée à l’histoire d’Apple. En fait, dès les années 80 il déclarait penser que son nom était lié à celui d’Apple quoi qu’il arrive, tout en pensant également qu’il incarnait Apple. L’avenir lui donnera bien sûr raison.

Si le texte suit une trame globalement temporelle, le découpage suit en fait des thèmes recouvrant certaines périodes, comme celles de sa relation avec sa première fille, Lisa Brennan ou l’Apple II, ou l’iPod, etc… Ces tranches de vies se recouvrant, le fil des chapitres se recouvre en partie telles les ardoises d’un toit. Loin d’être déstabilisante, cette approche rend le livre plus captivant, certains événement faisant la liaison entre différents chapitres.

L’auteur a choisit de ne faire aucune concession par rapport à l’image du personnage, mettant en valeur son talent, son génie et son exigence par rapport aux produits qu’il voulait développer tout comme les côtés nettement moins reluisants de sa personnalité « vous avez découvert que je suis un sale con ? Quel scoop ! » comme le rapporte Walter Isaacson sur une conversation entre Steve Jobs et un journaliste. La prose mêle finement l’histoire racontée, les témoignages et l’analyse faite par l’auteur qui encore une fois ne cherche pas à embellir le tableau mais à nous faire comprendre l’homme. Mission accomplie de ce côté, les motifs récurrents du fil de sa vie apparaissent clairement : une quête de perfection dans la simplicité ne s’embarassant ni des « impossibilités techniques » ni des personnes avec qui il devait ou aurait pu collaborer, la volonté de marier art et technologie en gérant l’expérience utilisateur de bout en bout en n’acceptant aucune concession.

Steve Jobs n’est pas un créateur. Ou s’il en est un, sa réelle création est Apple. Mais il faisait travailler des créateurs et les guidait ou les fustigeait la plupart du temps suivant la voie qu’il voulait suivre exigeant toujours plus, plus beau, plus simple et élégant. Enfanter les projets auxquels il croyait justifiait tous les sacrifices y compris et surtout ceux de sa relation aux autres. Ainsi le texte lève le voile sur ses relations avec Steve Wozniak, John Sculey et de nombreux autres. Il nous permet de comprendre ce qui l’a entrainé dans l’aventure Pixar.

Cette biographie se lit comme un roman, liant le parcours privé et le parcours public. De nombreux témoignages viennent compléter le propos sans l’alourdir. La dernière partie du livre voit la fin du créateur d’Apple approcher et le texte est plus empreint de nostalgie

En grand manipulateur, Jobs voulait être maître de sa biographie, qu’elle soit définitive et n’en permette pas d’autre. Apparemment, il a encore et une dernière fois réussi.

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Référence complète : Steve Jobs – Walter Isaacson – JC Lattès 2011 – ASIN : B005UD7FS2 (Kindle edt.)

Steve Jobs


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