Note de lecture : Extreme Ownership, par Jocko Willink & Leif Babin

Note : 8 ; Quand le leadership signifie assumer ses responsabilités.

Voilà un livre (lâchons le mot : un best-seller) qui ne va pas revendiquer comme s’alignant sur les principes agiles, et pourtant… Les auteurs nous proposent les leçons de leadership durement acquises et éprouvées sur le terrain : celui des Navy Seals au centre des combats les plus violents en Irak. Bien sûr elles s’exercent au sein d’une chaine de commandements militaire, mais les auteurs savent en extraire les pépites qui prennent sens dans l’organisation d’une entreprise « pour diriger et gagner » et dans une certaine mesure dans les contextes agiles.

Le texte pèse 312 pages en moyen format en comptant l’annexe (qu’il est recommandé de lire). Les 12 chapitres empruntent tous le même format : la narration d’un épisode de la vie des Navy Seals, la plupart en zone de combat, sur plus de la moitié du chapitre. Puis un exposé du ou des principes mis en avant dans le chapitre, sur une à 3 pages. La fin du chapitre est dédiée à l’application du principe au monde de l’entreprise via un story-telling issu d’une expérience postérieure aux Navy Seals, dans l’accompagnement de managers via la société de conseil crée par les auteurs : Echelon Front.

Les 12 chapitres sont répartis sur 3 parties avec la régularité d’un papier à musique. Donc 4 chapitres par partie, à l’exclusion d’une introduction. Celle-ci n’emprunte pas la structure précédemment décrite mais décrit l’entrainement des Navy Seals afin de véhiculer un seul message : le leadership est l’unique facteur réellement important. La première partie s’intitule « gagner la guerre de l’intérieur ». Elle s’ouvre par le chapitre qui donne son nom à l’ouvrage : « extreme ownership ». Le message est simple : quoi qu’il arrive au sein de l’unité organisationnelle du manager, celui-ci doit assumer la responsabilité de tout ! Le second chapitre s’intitule « pas de mauvaises équipes, seulement de mauvais leaders ». J’en retiens une phrase forte : le standard de votre organisation, ce n’est pas ce que vous prêchez, c’est ce que vous tolérez. En corollaire, la responsabilité du leader est envers l’équipe avant d’être envers les individus.

Le chapitre 3 s’intitule sobrement « croire ». En tant que leader, on doit relayer la stratégie définie au niveau hiérarchique supérieur. La relayer signifie la défendre l’expliquer… y croire ! Les auteurs parviennent intelligemment à nous faire inclure dans le cercle du ownership l’appropriation de ces objectifs. Cette première partie se conclut sur « check the ego », un chapitre un peu plus faible où les auteurs nous invitent à mettre notre amour propre de côté quand il est question de prendre les décisions qui s’imposent.

La seconde partie porte un titre qui donne le ton : « les lois du combat » ! Elle s’étend sur un peu moins de 85 pages en 4 chapitres. On ouvre le bal avec « cover and move », la technique fondamentale du combat. Elle nous rappelle que le travail d’équipe exige souvent que certains membres effectuent un travail de support tandis que d’autres opèrent les avancées attendues. Mais tout le monde a participé au succès. Le lien avec le combat est ténu, mais le message fonctionne. Le chapitre 6 nous ramène vers des racines agiles : « simple ». C’est la qualité que doit avoir un plan pour être compris et fonctionner. Le message lui-même est simple.

Au chapitre 7 on évoque le « prioriser et exécuter », encore un principe convergent avec la pensée agile : se focaliser sur la plus haute priorité, l’exécuter et être prêt à réviser ces priorités quand le contexte évolue. Rien de nouveau ici, si ce n’est le lien avec la situation de combat qui offre un éclairage supplémentaire. Pour refermer cette seconde partie, le chapitre 8 évoque le commandement décentralisé. Le lien se fait ici avec l’agilité à l’échelle et l’acceptation qu’un commandement ne peut dépasser une poignée d’unité (hommes ou équipes). Bien sûr le principe de délégation est juste de l’autre côté de la porte. D’autres auteurs ont pour moi mieux analysé cette question de la délégation.

La dernière partie s’intitule « sustaining victory » et contient également 4 chapitres. Elle débute par un chapitre consacré au plan ! La conception du plan rejoint étrangement celle d’une planification agile : un objectif, une mesure du succès. Les détails de l’exécution sont laissés à ceux qui font et des alternatives de déroulement sont explorées. Le chapitre est toutefois un peu long et surchargé de détails liés au monde du combat. Le chapitre 10 est double : leading up and down the chain of command. Dans le “leading down”, le leader est responsable de la direction dans laquelle l’équipe dirige son effort, du fait qu’elle ait bien compris les enjeux. Le leading up met le leader en charge d’informer sa hiérarchie de manière appropriée pour obtenir les décisions et le support dont son équipe a besoin. Extreme ownership, on vous dit ! Ce principe fait en partie double emploi avec des principes vus précédemment, mais il illustre bien l’aspect holistique du leadership.

Le chapitre 11 met en scène Chris Kyle, le « American sniper » de Clint Eastwood pour évoquer l’incertitude : la nécessité d’être capable de prendre une décision en l’absence d’une image complète de la situation. L’illustration business rend malheureusement mal compte de ce principe. Le dernier chapitre du livre « the dichotomy of leadership » sera développé en un autre livre plus tard. Le réel message est l’équilibre difficile que doit trouver le leader : humble mais non passif, leader et suiveur, focalisé et détaché… Il y a un élément réellement intéressant ici, mais le texte ne me semble pas suffisamment élaboré pour livrer sa pépite.

J’ai lu pas mal d’ouvrages sur le leadership et le management écrits par des militaires, sans spécialement chercher ceux-ci. J’avoue que je les aie tous très bien notés. Celui-ci est probablement le plus « hardcore ». Les histoires se déroulant en Irak sont passionnantes, mais les auteurs leurs donnent trop de place, certainement en voulant bien camper le contexte. Mais l’articulation des chapitres en 3 parties marche très bien. Le message central de l’extreme ownership et les 12 principes qui l’accompagne comble un réel besoin : le manager n’est pas juste un facilitateur !

Extreme Ownership, par Jocko Willink & Leif Babin

Référence complète : Extreme Ownership – Jocko Willink & Leif Babin – St. Martin’s Press 2015 – ISBN : 978 1 250 18386 6

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