Note de lecture : User Story Mapping, par Jeff Patton

Note : 9 ; Bien au-delà du story mapping, vers la découverte de la vraie nature des spécifications agiles en tant que compréhension partagée. Book of the year 2015 !

Jeff Patton est un vrai maître Jeidi de l’agilité : après avoir lu, ou plutôt dévoré son livre, je n’en ai plus aucun doute ! Mais si vous pensez lire « simplement » un ouvrage décrivant par le menu la technique développée par Jeff Patton, vous allez être surpris ! Car c’est bien plus que cela.

Le livre fait un peu plus de 260 pages en 18 chapitres. Je dis « un peu plus de 260 pages » car le corps principal du livre est précédé d’une introduction « read this first » qu’il ne faut rater sous aucun prétexte. On y parle « instructions » versus compréhension partagée, de comparer les (docs de) spécification à des cahiers de voyage, de l’importance de raconter des histoire et d’être frugal dans la construction tout en cherchant à maximiser l’impact plutôt que les fonctionnalités ! Bref, cette introduction à elle seule a la valeur d’un très bon livre. Et ce n’est pas fini !

Raconter des histoires, c’est le sujet du 1er chapitre où l’auteur introduit les story maps dans le but de raconter la grande histoire du système, d’avoir une « big picture ». Il le fait d’ailleurs en racontant une histoire, celle de Gary par qui les user stories sont arrivées ! D’ailleurs la totalité du livre est formée d’histoires. Et celles-ci sont illustrées de photographies des fresques (en couleur dans la version anglaise) que sont ces stories maps auxquelles l’auteur surimpose des explications sous forme de cartographie.

Les 3 chapitres suivants sont consacrés à des angles de vue sur la planification. Au chapitre 2 Jeff évoque « Plan to build less » ou l’art de trancher fin en se focalisant non pas sur la fonctionnalité mais sur la valeur. Encore une fois cela est abondamment illustré, pas seulement visuellement, mais par l’histoire de Globo.com ; L’auteur nous propose de découper des releases longitudinales en suivant un « narrative flow ».

Au chapitre 3 on planifie pour maximiser l’apprentissage. On le fait en suivant l’histoire d’Eric. Cette stratégie nous permet d’abord de valider l’existence du problème que l’on cherche à résoudre. C’est réellement le cycle du Lean Startup vers lequel l’auteur nous guide, en l’exposant nommément. Ainsi on bascule des « tranches de release » de la story map vers notre board opérationnel en itérant sur le produit jusqu’à rendre viable l’outcome recherché.

Avec Mike et Aaron on va planifier pour finir dans les temps. Bien entendu, il sera question d’estimations à ce chapitre 4. Non pas une estimation pour se mettre la corde au cou, mais plutôt une gestion de budget qui permette d’ajuster le niveau d’achèvement en fonction du budget-temps. L’auteur parle de début de partie, milieu de partie et fin de partie. On ne parle pas de stories points ou autres techniques du même acabit qui nous refoulent dans la logique « combien de temps cela prends-t-il » qui est une logique pré-agile, mais d’une pensée du type « que puis-je faire dans le temps imparti ? ».

Retour à la réelle pratique des story maps au chapitre 5. Ou comment décomposer la colonne vertébrale de la story maps (les gros cailloux) en des choses plus petites (des moyens cailloux et des petits cailloux). En cela, Jeff Patton suit la philosophie de décomposition des cas d’utilisation d’Alistair Cockburn (cf. Writting Effective Use Cases). A la fin du chapitre, on a acquis les savoir-faire pour avoir de viande sur la colonne vertébrale, c’est à dire des « user tasks » et des briques de fonctionnalités pour supporter celles-ci.

C’est de User Stories dont parle le chapitre 6, hé oui ! Mais pas questions d’invest, ni de « en tant que… » auquel Jeff Patton préfère 3 questions ; Qui ? Quoi ? et Pourquoi ? Et de focaliser sur la véritable nature des User stories : le story telling et les 3Cs de Ron Jeffries. Les chapitres 7, 8 et 9 qui suivent adressent cette question de meilleure stories. Pour l’auteur, cela signifie des conversations plus riches et non du « template zombies ». Les informations collectées sur les murs ou les documents n’en sont qu’une reproduction « basse fidélité ».

Aux chapitre 10 l’auteur évoque le « scaling down » des stories, telles des recettes : faire un petit gâteau est comme un gros, on met simplement moins d’un peu tout. Mais qui nécessites aussi moins de moyen pour être réalisé.

Aux chapitres 11 et 11, on apprend à casser de gros cailloux en petits cailloux, ou comment rendre appréhendables nos stories pour le développement ! Les éléments clés sont 3 tailles de stories (business, user et équipe de développement), un approche par stories workshop centré sur une minimum viable solution et l’utilisation d’une « discovery team ».

Le texte de Jeff Patton nous emmène vers le monde du product management. Deux mots sont abondamment employés : opportunités (plutôt que fonctionnalité) et découvertes (plutôt qu’expression de besoin). A chacun de ces termes est consacré un chapitre, respectivement les 13 et 14. Cette approche recoupe résolument le Lean Startup en cela qu’elle est émergente. Le chapitre 15 conclut ce cycle d’apprentissage validé.

Retour aux User Stories au chapitre 16. Il est dédié à l’interaction entre Product Owner (même si on ne l’appelle pas ainsi) et équipe de développement. Le Story Map devient un outil de choix pour visualiser spatialement le progrès.

Enfin au chapitre 17 l’auteur prend un peu de recul sur la façon dont on progresse dans notre développement : c’est comme au jeu « astéroïdes » : il faut casser les astéroïdes en morceaux de plus en plus petits, mais aussi savoir sur lesquels on se concentre !

Jeff Patton nous conduit vers le véritable monde de la spécification agile, non pas comme une façon de spécifier plus légère mais avec une approche différente, un état d’esprit différent, un processus continu de découverte, d’apprentissage et de conversations qui ne se conclut pas par un produit terminé, car les grands produits (comme les grandes œuvres) ne sont jamais terminées, seulement abandonnées.

Nous sommes ici dans l’agile « niveau ninja ». Jeff Patton a mis 10 ans à produire ce livre. Mais quel livre ! A lire et relire absolument !

User Story Mapping

Référence complète : User Story Mapping – Jeff Patton – O’Reilly 2014 – ISBN : 978 1 491 90490 9

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