Note : 4 ; L’EAI pour le manager, plus que pour le développeur.
Cet ouvrage traite essentiellement des aspects stratégiques de l’intégration de systèmes existant. Il est donc dédié essentiellement aux décideurs, ce qui est la cible de la « IT series » d’Addison Wesley. C’est toutefois une belle bête avec ses 350 pages et ses 20 chapitres. Gageons que les CxO ne s’embarrasseront pas de cette lecture, mais que leurs écuyers, à savoir les consultants en management s’y attèleront, du moins pour certains.
Le premier chapitre va s’efforcer de définir l’EAI, mais au niveau de l’architecture IT, en tant que grand hub régulateur de l’anarchie des communications des briques du système, d’abord, ensuite comme régulateur des processus métier. Le focus sur les données au second chapitre est un peu brouillon. On y évoque différentes sources telles que le XML, les données relationnelles ou objet. Le propos tente de se tenir à la frontière entre la technique et le non technique, échouant finalement sur les deux. Le 3ème chapitre parvient mieux à faire le travail, en définissant différents niveaux de services et en abordant quelques standardisations reconnues.
Retour à la confusion au chapitre 4 qui aborde le « method-level EAI », qui se veut une intégration au niveau processus métier. L’auteur nous inonde de technologies que l’on peine à raccorder à ce concept. L’intégration au niveau des interfaces utilisateur est un concept plus facile à appréhender. C’est le sujet du chapitre 5, mais l’auteur ne s’y attarde pas. On voit rapidement les travers de cette approche, aussi je n’en veux pas à l’auteur pour sa brièveté. Le chapitre 6 est bien fait, clair et riche. Il nous propose un « processus EAI », certes à l’ancienne, en 12 étapes toutes clairement définies et expliquées dans les 30 pages de ce chapitre. C’est le point fort de l’ouvrage.
Le chapitre 7 est assez technique, car il aborde les différents middlewares qui sont au centre de l’EAI. Il parvient toutefois à rendre abordable la question à un public non technique. Le chapitre 8 s’inscrit dans la continuité, puisqu’il adresse les middlewares transactionnels. Cela reste intéressant mais un cran en-dessous du chapitre précédant. Le tour des socles techniques se poursuit (mais ne se termine pas) par les MOMs et RPCs. En fait il s’agit surtout des MOMs, avec un focus particulier sur les technologies Microsoft. On y trouve ses repères mais le chapitre aurait pu être mieux.
Les objets distribués viennent compléter la fresque au chapitre 10. Il s’agit plutôt d’une introduction au sujet, mais on ne raccorde pas facilement cela au sujet de l’ouvrage. Le chapitre 11 est lui consacré aux « databases middlewares ». C’est un bien grand mot pour parler de JDBC et ODBC. Un titre moins racoleur aurait fait l’affaire. La tournée technique s’achève avec Java au chapitre 12. Un chapitre assez léger tournant autour des normes JEE (circa 2000).
L’intégration d’applications packagées est à l’ordre du jour du chapitre 13. Une idée un peu trop large et un peu trop vague pour avoir une idée concrète de ce que cela veut dire. Dommage. Le chapitre 14 est plus spécifique car il adresse SAP R/3 ! On aime ou on n’aime pas SAP. Moi je n’aime pas. Cela dit le chapitre donne un aperçu très concret de l’architecture de SAP, ou du moins de ses couches. L’auteur nous donne en pâture les différents niveaux d’interfaçage possibles. On ne tombe jamais dans la technique pure et dure, mais c’est du concret. Le chapitre 15 qui répète l’exercice pour Peoplesoft est un peu en-deçà, mais cela reste très bien. Retour aux généralités avec le chapitre 16 qui adresse l’intégration au-delà de l’entreprise avec le supply chain. Le chapitre est plaisant mais peu instructif.
Le XML est le langage universel des EAIs, et ce chapitre 17 compte nous servir d’introduction au sujet. Ainsi avons-nous un aperçu stratosphérique de sujets tels que la DTD, le RDF et XSL. Le chapitre ne me paraissait pas vraiment indispensable dans l’ouvrage. Le chapitre 18 est l’un de mes préférés car on y aborde le fonctionnement dynamique de l’EAI : adaptateurs, transformations, règles de transformations et entrepôts de messages. Entre autres. Bref, un chapitre instructif, cette fois. L’avant dernier chapitre adresse l’automatisation des processus métiers. Beaucoup de promesses, mais peu de réalités. Il en va de même ici. Enfin, l’auteur s’aventure pour clore le livre sur l’avenir de l’EAI. Une venture mesurée, car il n’y a guère que sur l’intégration inter-entreprises où il sort un peu des sentiers battus. Là, les ESBs viendront sonner le glas de cette technologie mamouthèsque.
Le titre aura intéressé surtout les personnes ayant des préoccupations type « directeur informatique », les aspects stratégiques des différentes approches étant évoquées. Pour l’informaticien, la grosse plus-value est le tour d’horizons très complet touchant aux middlewares et aux ERP, même si on aurait aimé voir un peu plus d’aspects techniques. A présent, on accordera surtout à l’ouvrage une valeur archéologique.
Référence complète : Enterprise Application Integration – David S. Linthicium – Addison Wesley 2000 – ISBN: 0-201-61583-5