Note de lecture : Les Innovateurs, par Walter Isaacson

Note : 8 ; La grande saga de l’informatique … avec un point de vue subjectif.

Walter Isaacson est le biographe de Steve Jobs, entre autres chose. Il fut aussi journaliste au Times. Bref, il sait écrire et raconter, on s’en rend très vite compte. Le format poche du livre fait 860 pages, mais c’est au format Kindle que je l’ai lu. Il est structuré en 12 chapitres qui chacun couvre une période de l’histoire de l’informatique.

L’auteur a décidé de remonter aux prémices avec un chapitre consacré à Ada Lovelace ou plus exactement à Ada et Babbage, mais centré toutefois sur la fille de Lord Byron. Un chapitre sans concessions sur celle que l’on considère comme la pionnière de la programmation, mais qui vantait sans retenue ses capacités intellectuelles. C’est sur la publication « Sketch of the Analytique Machine » par LF Menebrea, mais traduit en Anglais par Ada et augmenté de ses notes que s’attarde Walter Isaacson. Ce sont ces notes (qui occupent d’ailleurs plus de place que le texte original) que se trouvent toutes les trouvailles et les projections concernant la machine analytique et cela est fort bien analysé par l’auteur.

Le second chapitre s’intitule « l’ordinateur », il s’agit bel et bien de l’invention de l’ordinateur. L’auteur nous dresse le paysage des prémices de l’ère numérique avec les Shannon, Lorenz, Aiken, Atanasoff et surtout Mauchly, car l’auteur ne peut se vanter d’être objectif en dédaignant l’aspect programmable du Mark I et II au profit du fonctionnement à lampe du non-programmable Eniac. Le rôle Von Neumann dans ce projet y est clarifié, entre autre qu’il permit à l’industrie informatique d’éclore à cette époque en coupant l’herbe sous le pied de la brevetabilité de l’architecture des machines. Ce second chapitre est assurément l’un des plus passionnants.

Au troisième chapitre, on aborde la naissance de la programmation. Sans grande surprise, les protagonistes principaux en sont Grace Hopper, les « femmes de l’Eniac » et John Von Neumann. Le récit de cette période qui va de la guerre aux années 50 est un peu biaisé, avec cette fois encore un rôle essentiel donné à l’Eniac. Je continue à me demander si l’auteur rend vraiment justice aux contributions respectives. Une question qui reste ouverte.

Le 4ème chapitre relate l’invention du transistor par Bratten, Shockley et Bardeen aux laboratoires Bell. Une invention qui est relatée ici avec moult détails et c’est passionnant. L’histoire se poursuit avec la création de Shockley semiconductors avec les futurs créateurs d’Intel qui feront un détour par Fairchild en se séparant de l’irascible Shockley.

C’est au circuit intégré qu’est consacré le chapitre 5. Les protagonistes sont plus des sociétés que des individus, bien que l’auteur continue de relater les contributions de ceux-ci. Mais ce sont surtout les guerres de brevets qui apparaissent ici.

Plus inattendu est le chapitre 6 consacré aux jeux vidéo. On n’y parle pas seulement de Spacewar et de ses descendants, mais aussi de culture hackers et bien sûr d’Atari. Internet méritait sans aucun doute son chapitre, il s’agit du 7ème. C’est à Vannevar Busch que l’auteur en fait remonter l’origine. Puis évidemment, c’est Arpanet qui est mis en lumière. Puis l’auteur nous amène à comprendre comment ce réseau est devenu Internet au milieu du flower power des années 70.

L’histoire de l’ordinateur individuel contée au chapitre 8 recoupe furieusement celle racontée dans « fire in the valley ». L’histoire fait écho à celle racontée de manière plus fouillée dans le texte de Michael Swaine. Mais le talent de conteur de Walter Isaacson fait encore merveille. Assez curieusement, le logiciel fait l’objet d’un chapitre à part, le 9ème. Il y est question de l’histoire de Microsoft racontée sans concession pour l’image de Bill Gates, d’Apple et d’IBM, mais aussi du logiciel libre. Passé l’épisode Microsoft, l’histoire perd un peu de son souffle épique.

L’avènement du Web est découpé en 2 chapitres : le chapitre 10 traite des prémices, tels que l’avènement d’AOL ou la création de TCP/IP et le 11ème dédié au Web. Un chapitre qui rend justice aux contributions respectives de Tim Berners-Lee et de Marc Andreesen, contrairement à « Fire in the Valley », avec aussi une part respectable réservée à l’émergence de Google.

L’auteur s’offre une pirouette fort réussie avec le dernier chapitre « éternelle Ada » en rebouclant l’histoire contemporaine de l’informatique avec la vision initiale d’Ada Lovelace.

Walter Isaacson est un biographe de grand talent, et cette épopée est racontée de manière aussi prenante qu’elle est justement documentée. Pour chaque personne majeure évoquée dans le texte, il va jusqu’à remonter non seulement à l’enfance mais jusqu’à l’histoire de leurs parents ! Les sources documentaires sont aussi imparablement vérifiées, ce qui est la marque d’un véritable journaliste. Ce n’est peut-être pas un texte aussi marquant que la biographie de Steve Jobs, bien que ce soit un travail plus personnel, mais il vaut incontestablement le détour.

Les Innovateurs, par Walter Isaacson

Référence complète : Les Innovateurs – Walter Isaacson – J.C. Lattès 2015 (V.O. : The Innovators ; Simon & Schuster 2014 ; ISBN : 978-1476708690) – ASIN : B015ZG66E2

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