Note 7 ; Un excellent outil de facilitation et un très bon texte, auquel il manque hélas un aspect de mise en pratique.
Edward de Bono ne tari pas d’éloge à propos de sa méthode qu’il considère pratiquement comme l’une des créations majeures du 20ème siècle. Sans aller jusque là, l’approche de la pensée parallèle a d’excellente vertus par rapport à la confrontation et l’argumentation qui ressemblent trop souvent à des jeux à somme nulle !
Le livre est très vite lu : un format réduit et 200 pages saucissonnées en 43 très petits chapitres y contribuent. 3 chapitres introductifs et un dédié à la conclusion encadrent l’essentiel de la prose regroupées en 6 six sections : une par chapeau. Les 3 premiers chapitres font un peu « dépliant publicitaire ». Toutefois, le premier éclaire bien sur la notion de pensée parallèle que l’auteur oppose à l’change argumenté de Socrate. Et le second nous donne un tour d’horizon fort correct de la signification des chapeaux.
On commence avec le chapeau blanc, celui des faits et des chiffres. Il requiert de l’impartialité, des questions précises excluant toute interprétations. L’un des mérites du chapeau blanc est de séparer l’opinion des faits : il y a d’autres chapeaux pour partager une opinion ou faire part d’une croyance.
A contrario, le chapeau rouge est celui des ressentis, des sentiments. Il est utile pour évacuer ceux-ci (exutoire) afin qu’ils n’entachent pas les autres chapeaux, on va donc le trouver souvent en début de discussion. Mais on va aussi en fait le retrouver à la fin, car c’est lui qui le plus souvent permet de trancher une décision. Parmi les règles d’utilisation, notons que ce qui est dit en chapeau rouge n’appel nulle justification ni contre-argumentation.
Le chapeau noir est celui de la prudence, de la gestion de risque. Il ne convie à regarder tout ce qui pourrait tourner mal. Celui-ci ne fait pas très « solution focus », mais comme le souligne l’auteur il a son intérêt en évitant d’ignorer les travers d’une idée. C’est l’abus de chapeau noir qui est préjudiciable, en nous tirant en arrière.
Le chapeau jaune est le pendant du précédant. Il nous invite à voir le bon côté d’une idée. Ce faisant, il spécule sur les possibilités. Il n’est pas très facile à porter, car ce n’est souvent pas dans notre nature. De même voir les possibilités ne signifie pas faire preuve d’un optimisme inconsidéré. La limite est aussi mince entre l’analyse des possibilités, qui est plutôt un point de vue opportuniste, et une impression qui relève du chapeau rouge. Le chapeau jaune admet des visions et des rêves, ce qui le rapproche du chapeau vert (créativité).
Le chapeau vert est là pour générer de nouvelles idées, plus que pour en modifier d’existantes (ce qui serait plutôt le rôle du chapeau jaune). La présence délibérée du chapeau vert permet de libérer la parole, d’exprimer des idées qui peuvent être provoquantes sans tabous ni contraintes, une approche en contradiction avec la pensée critique. Un des points faibles de cette partie est l’évocation de la « pensée latérale », un thème cher à l’auteur (et dont il est fier). Mais peut-être est-ce parce que c’est le sujet d’un autre ouvrage, le concept n’est pas développé ni même expliqué ici.
On termine le tour des chapeaux avec le chapeau bleue, celui de la position « méta », qui permet d’analyser ce qui se passe, de prendre du recul. C’est le chapeau du facilitateur, mais tout le monde peut le mettre.. Encore une fois, expliciter la prise de recul a bien des vertus.
La technique des six chapeaux intègre d’évidents atouts en facilitation :
- Tout d’abord en explicitant la direction dans laquelle développer son propos, en évitant la confusion des intentions.
- En couvrant efficacement le spectre des points de vues, grâce aux six directions que propose les six chapeaux.
- En utilisant la pensée parallèle, plus constructives, plutôt que le débat contradictoire, sans pour autant occulter la diversité des points de vue, mais en les abordant en séquence.
Le texte aborde très clairement les différents aspects de chaque chapeau, en leur accordant un petit chapitre à chacun et en les résumant en conclusion de chaque partie. Les éléments de dialogue apportés sont trop fragmentaires pour réellement nous éclairer. J’ai eu trop souvent l’impression que l’auteur en gardait sous le coude pour son business de formation. Dans le même ordre d’idée, il manque une partie consacrée à la mise en œuvre globale, illustrant celle-ci si possible avec des exemples réels. En compensant ces faiblesses, le livre aurait facilement gagné un voir deux points.
Cela reste malgré tout un très bon texte et une technique qui mérite d’être maitrisée.
Référence complète : Les six chapeaux de la réflexion – Edward De Bono – Eyrolles 2005 (V.0. : Six Thinking Hats ; Black Bay Books 1999 ; ISBN : 9780316178310) – ISBN : 978 2 212 56803 5