Nous voici arrivés au bout de notre périple. Les épisodes précédents sont disponibles ici et ici pour la journée du Jeudi, et ici pour le vendredi matin.
Au programme de cette dernière après-midi : des demi-sessions (dont la mienne) et une clôture de l’évènement toute particulière !
Matti Schneider : Petit board deviendra grand
Je ne connaissais pas Matti. Je dois dire qu’il m’a bluffé par son niveau de maturité en agilité et la qualité de ses analyses. Peut-être est-ce lié au fait qu’en plus d’être ingénieur, il est également étudiant en anthropologie ?

Matti évoque pour nous l’amélioration continue, avec une approche qui sort des très classiques rétrospective et est d’avantage « centrée artéfacts ».
Façonner nos outils
Le point essentiel de la présentation est l’utilisation d’un outil (oui !), en fait un tableau, qui va guider l’équipe d’une façon particulière : faire entrer en résonance le descriptif et le prescriptif par le biais de cet outil !
Quand un changement de workflow est pressenti : le tableau change et devient prescriptif. Et comme l’équipe suit ce tableau, il devient alors prescriptif. Le tableau évolue par le biais de l’équipe de production qui est elle-même une partie de l’outil de production ainsi décrit.
Le passage d’une étape à une autre fait l’objet d’un « point fixe » : un état que l’on sait parfaitement définir par lequel passe obligatoirement les items. En dehors de ces points fixes, la façon dont évoluent ces items peut varier !
Voilà qui rappelle une citation de McLuhan : nous façonnons nos outils et eux-même à leur tour nous façonnent ! Et la façon dont nous les façonnons passe au travers de nos interactions.
Reflection workshop
Cette approche, à la base une variante des classiques rétrospectives agiles, est issu de Crystal Clear d’Alistair Cockburn. L’incarnation qu’en fait Matti est au travers d’un board synthétisant les décisions prises au long des itérations ! On a donc une vue d’ensemble de la chose. Les règles sont d’abord simples (dans les premiers sprints) et deviennent de plus en plus pointues. Elles peuvent aussi être changées / abandonnées, on leur superposent alors un post-it bleu avec le numéro de l’itération à l’origine de ce changement.
Les tickets agissent comme des « reminders » évitant de réitérer une discussion sur laquelle il y a déjà eu un accord. Certains guides focalisent sur l’usage du board lui-même, une sorte de niveau méta…
Ce que j’en ai pensé
Une présentation remarquable qui traduit une maturité tout aussi remarquable. Ce fut ma présentation préférée de cette après-midi là.
Géry Derbier : Les jeux de langage de Ludwig Wittgenstein
Ce n’est pas souvent que Géry nous gratifie d’une session qui n’est pas un atelier. En fait, c’est la première fois que j’y assiste ! Géry avait envie de partager depuis longtemps ce qui l’attire sur la pensée de Ludwig Wittgenstein. Une session pas très facile à suivre et encore moins facile à retranscrire !

Le plus simple est problement de ne pas faire de retranscription. Je vais simplement relever certains éléments que j’ai noté au fur et à mesure de la présentation de Géry.
- La primauté de l’acte sur la pensée.
- La théorisation est vaine. Il est préférable de voir et décrire ou « déconstruire » précisément.
- Comprendre n’est pas l’intellectualisation de quelque chose, mais l’aptitude à le faire.
- Nous utilisons un langage : regardons comment il fonctionne.
Cette façon de pensée amène Géry, en tant que coach, à demander au coaché de « déconstruire » les constats par une question : comment le savez-vous ?
C’est aussi ce mode de pensée qui a amené Gery vers le solution focus qu’il voit comme une incarnation de la pensée de Wittgenstein.
Ce que j’en ai pensé
Une session difficile à suivre qui nous amène vers les sentiers d’une philosophie à contre-courant. Je ne suis certainement pas rompu à cet exercice (je n’ai même pas d’épreuve de philo dans mon bac technique !). Bref, je passe pour l’instant…
Pierre Hervouet : Manipulé à l’insu de mon plein gré
Hélas, j’ai assez peu suivi la session de Pierre. Il faut dire qu’elle précédait juste la mienne. Au minimum pour commencer, je peux vous en livrer le teaser.
Pourtant cette session s’articule autour d’un de mes sujets préférés : les biais cognitifs ! Pierre évoque ainsi quelques mécanismes :
L’ancrage
Le cerveau humain juge souvent en relatif. Si on fournit une référence, elle biaise les résultats obtenus, par le haut ou par le bas, suivant que le référence d’origine est haute ou basse respectivement !
Le planning poker, en exigeant que les cartes soient montrées en même temps cherchent à éradiquer ce biais.

L’identification
S’identifier à une personne est plus fort que s’adosser à des statistiques ! Le mécanisme des persona s’appuie sur cela (en lieu et place des rôles, plus abstraits).
Ce que j’en ai pensé
Essentiellement que je suis frustré de n’avoir pas mieux suivi cette session. Damnation ! Car le sujet m’intéresse au plus haut point. Mais je ne peux en vouloir qu’à moi-même. J’espère que le support ou mieux l’enregistrement sera bientôt disponible…
Christophe Addinquy : User Stories, what else ?
C’est mon tour ! Au programme une version plus dense, en partie raccourcie et en partie modifiée de ma présentation faite à Agile Grenoble 2013. J’ai dans ma liste de tâches, la rédaction de cette présentation sous forme d’article, comme je l’ai fait pour Scrum Shu Ha Ri.
Je publierai aussi sous peu la nouvelle version correspondante du support.
Les 10 buzzwords du hipster agile
Cette dernière demi-session ne fut pas ma préférée de l’après-midi, bien au contraire. Le but était en principe de démystifier certains de ces buzzwords, de les dégonfler. En fait, je me suis trouvé en désaccord avec nombre des assertions de Christopher et Hervé !

- Lean Startup = XP + Product Management ! Bien sûr, Eric Rie est un ancien de XP. Un peu léger pour affirmer que Lean Startup est un réhabillage d’XP avec les idées de Steve Blank ! Il ya mieux et plus à dire d’autant que l’inspiration initiale est beaucoup plus « lean ». Dehors !
- Le MVP n’est pas la réalisation minimale de mon produit. Je suis d’accord !
- Le devops n’est pas un process ou un outil, mais la collaboration entre ops et dev : d’accord aussi !
- Continuous deployment, ce n’est pas mettre en production des bug fixes tous les jours. Certainement, mais d’ou vient cette idée ?
- Le Kanban, il doit suivre la définition d’Anderson ! Ce n’est pas lui qui a inventé le Kanban, et on peut aussi faire des proto-Kanban sans mettre en place de WIP initialement !
- Le Proxy PO : Bon, nous sommes d’accord sur l’absurdité du concept !
- La transformation agile d’entreprise. Une foutaise pour les orateurs. Certainement, si on mène cela comme un nouveau process et non comme un changement culturel et organisationnel !
- La feature team : Désolé, je ne suis pas prêt à considérer comme un « nouveau buzz » quelque chose décrit par Ken Schwaber en 2004…
- Le Design Thinking. Bien, là aussi je doute que les orateurs ait fait l’effort de rentrer dans le concept…
- Agile. Oui c’est vrai le « on fait ça depuis longtemps mais on appelait pas ça comme ça », on l’entend réellement tous les jours.
Bref, pas enthousiasmé par cette session. Mais alors, pas du tout…
Fresque Finale
Le scribing était notre grand fil rouge de la conférence. Pour clore en beauté celui-ci, Romain nous a invité à élaborer en commun une grande fresque faisant le tour de la salle Belvédère. Un bel exercice !

Keynote de clôture ?
L’organisation d’Agile France nous réservait une petite surprise pour clore ces deux jours : une fausse session proposée avec talent par la compagnie des Z’Humbles.

Drôle et bien enlevé. C’est une façon originale de terminer cet Agile France !
Alors, cet Agile France 2014…

Une formule en grand changement pour cette nouvelle édition, avec deux après-midi à caractère spécifique, sans oublier le fil rouge de Romain. Toujours une grande qualité dans les sessions et la magie du Chalet de Porte Jaune ! Les organisateurs ont réellement redoublé d’efforts pour réussir cette nouvelle édition.