Note : 5 ; Où l’on apprend quand même quelques trucs intéressants chemin faisant d’une lecture quand même un peu poussive…
Impulser, réussir et maintenir des changements de pratique ou de culture dans une entreprise est une mission difficile. En fait, cela rate dans la très grande majorité des cas. Les auteurs de langage de patterns (car c’est de cela que l’on parle) ont mené un long et minutieux travail de collecte d’informations, d’interviews et de revue pour produire ce livre. En fait, j’en fus même un peu le témoin car une partie du travail de revue se fit lors de la conférence PLOP 1999 à laquelle je participais (mais pas dans le même groupe de travail).
Pour moi, la mauvaise nouvelle est que ce livre partage les mêmes problèmes que presque tous les livres basés sur des langages de patterns : ils font des livres peu plaisant à lire. En effet, en lecture linéaire, c’est un peu comme lire le catalogue de la redoute. Ca se fait mais il faut être pas mal motivé. Pour en terminer sur la forme, on notera que les patterns présentés utilisent la forme Alexandrienne, donc la forme dite « classique ». C’est un peu comme, en poésie, composer son œuvre en Alexandrins (mon humour est décidément trop fort pour moi !). La taille de chaque pattern varie entre 2 et 8 pages, approximativement.
Après la forme, le fond. Les 250 pages de l’ouvrage sont découpées en 3 parties très inégales. La première partie est assez classique. Elle compte 85 pages et est constitué de 12 chapitres qui sont donc tous très courts.
Après une courte introduction au changement et aux patterns, les chapitres 3 à 12 introduisent les patterns par nature d’usage, c’est à dire en les regroupant par demi-douzaine environ en utilisant la technique du story-telling. Cela rend ces courts chapitres plaisants à lire, mais ils me donnent aussi l’impression fugace de ne pas rentrer au cœur de l’action.
La seconde partie « expériences » est très courte avec ses 14 pages qui présente succinctement quelques cas d’usages (4 en tout) des patterns qui seront ensuite présentés en indiquant la stratégie de mise en œuvre de ces différents patterns. C’est très abstrait, d’autant qu’à ce stade on n’a pas encore passé en revue les patterns en question.
La 3ème partie est de loin la plus volumineuse, elle est la substance du livre : 49 patterns couvrant près de 150 pages classés par ordre alphabétique. Bien sûr, impossible (et inutile) de les lister ici. Voici quelques uns de mes préférés :
- Brown Bag : Pour créer un environnement propice et ouvert aux idées innovantes dans un climat détendu.
- Do Food : Encore de la nourriture ! C’est un moyen propice pour transformer le climat d’une réunion et en faire un événement festif !
- External Validation : Lorsqu’une idée est difficile à faire passer… et qu’elle est mieux écoutée si elle adoubée par quelqu’un d’autre.
- Local sponsor : Aider l’introduction du changement avec le support d’un manager local.
Bien sûr, il y a d’autres patterns qui m’ont plu. D’autres m’ont paru naïf ou même simplement inutiles. Je pense par exemple à :
- Just do it : Mettre en œuvre les changements pour pouvoir en parler. Hum !
- Just say thanks : Ne pas oublier à remercier ceux qui vous ont aidé. Sans blagues ? Heureusement que j’ai un pattern pour ça…
- The right time : Penser à choisir le moment propice pour mettre en place une action ou parler de quelque chose. Ouais…
Les langages de pattern font rarement des lectures palpitantes. Je l’ai dit au début. Et ce bien que je me considère depuis longtemps comme un aficionado des patterns. La forme Alexandrienne favorise les patterns très courts et limités précisément à une seule idée. Suivant ce cheminement il était inévitable de finir avec un nombre important de patterns, d’où la nécessiter de les « clusteriser » comme cela a été fait en première partie du livre, et c’est évidemment une bonne idée.
Hormis le côté un peu rébarbatif de la lecture façon patterns, la succession des patterns passés en revue me les a fait classer en 3 catégories :
- Les patterns creux, voir vide de sens.
- Ceux qui m’ont semblé « juste OK ».
- Ceux qui ont soulevé un point intéressant, à garder en mémoire pour l’avenir.
La plus large population est la seconde. Sans rendre la lecture désagréable, ils ne donnent pas une substance particulière au livre, tandis que la première catégorie fait un peu « bouche trou ». C’est évidemment la troisième catégorie qui fait le véritable intérêt du texte, et cela concerne une douzaine de patterns, dirais-je. On m’avait dit le plus grand bien de livre, voir plus, et cet écho m’est venu de diverse directions. C’est peut-être pour cela que le texte m’a laissé un arrière goût de déception. Mais cela ne doit pas forcément être votre cas.

Référence complète : Fearless Change, Patterns for introducing new ideas – Mary Lynn Manns & Linda Rising – Addison Wesley 2005 – ISBN : 978-0-201-74157-5