Note de lecture : The Agile Leader, par Zuzana Sochova

Note : 3 ; Beaucoup d’éléments d’intention, mais pas grand-chose pour aider ni même faire comprendre ce qu’est un leader agile…

C’est le second livre en langue anglaise de cette auteure en langue anglaise qui nous a gratifié d’un premier volume sur le Scrum Mastering. Le parcours professionnel de Zuzana Sochova mérite le respect, non seulement sur ses accomplissements au sein de la Scrum Alliance que dans ses expériences. L’avant-goût est prometteur. Comme nous le verrons hélas, tout cela a bien du mal à se concrétiser dans le texte !

L’opuscule ne nous fera pas souffrir trop longtemps : malgré ses 310 pages, son format plus réduit qu’à l’accoutumée et ses nombreuses illustrations (en fait des scribings, souvent très bons, de la main de l’auteure) lui rendent l’équivalent d’à peu près 200 pages d’un format plus habituel. Le découpage en 12 chapitres semble plus pertinent sachant cela. Le tout est structuré en 2 parties inégales. La première « unleash your leadership potential » compte 200 pages pour 8 chapitres. Dans le chapitre introductif, l’auteur fait état de sa propre expérience pour pousser le besoin d’un changement : une organisation sans management !

Le second chapitre nous vend le leadership comme étant avant tout un état d’esprit. Parmi les points (rares) positif de ce chapitre je retiens l’utilisation du « modern agile » de Kerievsky comme boussole agile. Cela change de l’habituelle litanie autour du manifeste. Sinon le chapitre nous laisse largement sur notre faim sur la nature du leadership agile ! Il est question d’évolution organisationnelle au chapitre 3, et on y enfonce beaucoup de portes ouvertes, pour nous expliquer une fois encore qu’il faut passer de l’organisation 1.0 hiérarchique vers une auto-organisation 3.0. Ce n’est plus ce que l’on pourrait appeler une idée nouvelle.

Le chapitre 4 « the agile leader » est le plus important du livre, ce qui se comprend facilement. Mais une fois encore, le texte échoue à donner substance à ce qu’est un leader agile ! Le poussiéreux « servant leader » y côtoie avec difficulté le modèle leader-leader de de David Marquet. Le moins inintéressant est sans doute le modèle partant de l’expert au catalyste emprunté à Bill Joiner. Le propos ressemble à un kaléidoscope qui s’assemble mal et où aucun élément n’est original. Le « agile leadership model » au chapitre 5 qui lui fait suite, s’articule sur 3 éléments : tout d’abord la prise de conscience (awareness), puis se saisir de la situation et enfin agir en conséquence. Je n’y vois rien d’original, et le chapitre est d’ailleurs assez court.

Le chapitres 6 va parler de compétences, et ce sur une cinquantaine de pages ! Du moins c’est ce qu’on prétend. Car il s’agit plutôt d’un melting-pot de principes, de modèles et de pratiques que l’on connecte fort difficilement les uns aux autres. Une fois encore, ce sont plutôt les sources d’inspiration de l’auteur qui sont listées ici (de bonnes sources, par ailleurs) mais dont les éléments tels qu’ils sont évoqués ne sont guère utilisables. Le feedback et la facilitation y tiennent une place importante. Ce n’est guère étonnant : pour l’auteur, le leader / manager n’est ni plus ni mois qu’un Scrum Master. C’est un point sur lequel je suis en désaccord majeur. Au chapitre 7, on évoque les « méta-skills », qui sont plus ou moins les valeurs que l’on incarne. Le chapitre ne couvre que quelques pages, vite passés sur lesquelles il n’y a guère à mémoriser.

Le chapitre 8 qui conclut cette seconde partie est consacré aux organisations agiles et va nous occuper sur une cinquantaine de pages. Là encore, nous trouvons pas mal d’emprunts, entre lesquels l’auteur peine à donner un sens. Le plus notable est le Tribal Leadership, mais cette fois encore je vous conseillerais plutôt la lecture originale de Dave Logan et de ses co-auteurs…

La seconde partie a pour objet les différentes parties d’une organisation agile. Elle couvre une centaine de pages sur 3 chapitres auxquels il faut ajouter la conclusion. L’agilité métier est à l’honneur en ce chapitre 9, que l’auteur réduit, non sans une certaine naïveté, à l’agilification du comité de direction. Toutefois, quelques témoignages au sein de ce chapitre valent le détour.

C’est aux RH et aux finances qu’est consacré le chapitre 10. Côté RH, c’est le recrutement et les évaluations qui sont abordés. On trouvera à mieux se nourrir en allant voir du côté de Johanna Rothman et de Jurgen Appelo. J’en garde l’impression que l’auteur essaie surtout d’occuper le terrain… Quand on parle finance agile, on pense beyond budgeting. C’est bien ce qui est évoqué, ou plutôt à peine mentionné sur 3 pages. Avec les outils et pratiques du chapitre 11, l’auteur tente de nous donner à manger, peut-être parce que les chapitres précédents sont restés au niveau des concepts généraux. De mon point de vue, c’est bien dommage de passer d’un extrême à l’autre. On frise le hors sujet ici pour un ouvrage qui se dit centré sur le leadership. Je passe sur la conclusion qui n’apporte guère d’élément nouveau.

Je n’attends pas d’un ouvrage sur le leadership ou sur le management plus largement qu’il nous apporte des réponses toutes faites. Mais j’en attend un certain sens qui me donne des clés pour orienter mes réflexions et mes actions. L’auteur pense sans doute avoir fait cela. Mais d’un côté sa vue est naïve en prétendant qu’il n’y a pas besoin de management mais seulement de facilitateurs. D’un autre côté, on hérite d’un patchwork d’idées très générales difficiles à assembler ou à actionner mais pour lesquelles l’auteur nous dit : Eh ! Vous savez, ça marche super-bien pour moi ! En ce qui mee concerne, je juge cela très insuffisant.

Référence complète : The Agile Leader – Zuzana Sochova – Addison Wesley 2021 – ISBN: 978 0 13 666042 2

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